Les faits sont relatés, sinon établis.
Comme le système veut que chacun apporte sa dose de mensonge, il n'y a en réalité rien de vrai, y compris dans les rapports. Même les faits objectifs sont subjectifs. Les descriptions sont insuffisantes pour visualiser de bout en bout une réalité, les photographies, les comptabilités, les produits interdits, s'ils sont là, sont déjà sujettes aux doutes.
Pensons par exemple que des photographies de perquisitions peuvent être prise après les opérations de fouille, après la mise en désorder indescriptible, résultat d'une fouille, et que le rapport des enquêteurs dira que le domicile a été trouvé dans un état de désordre indescriptible, photographies à l'appuis. Oui, mais photographies prises après la création de ce désordre, car s'il y a bien des photographies qui vont être prises avant les opérations de fouille, personne ne va les réclamer, notamment pas le justiciable qui n'a pas accès à l'"album photographique" dès son élaboration, mais ne le verra que bien plus tard, lorsque les copies pénales lui seront transmises. Il sera bien trop tard, malgré ses affirmation vraies, pour expliquer que se sont les photographies après la fouille qui ont été collationnées dans l'album, et non celles prises avant, en l'état de découverte du domicile.
Pensons en matière civile aux pièces tronquées, truquées, aux photocopies indifèles et pourtant communiquées sans que le juge n'y voit rien à redire, sans que les "originaux" ne soient demandés, abstinence pratiquée dans la plupart des cas, car un mensonge simple est toujours plus simple à "traiter" qu'une vérité révélé après établissement du mensonge, sujet potentiel à des poursuites pénales, ce qui risque de complexifier l'affaire.
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En réalité, les faits ne vont servir qu'à en retenir ce que l'on veut.
Non seulement, ils sont faux, mais en plus ils vont être moulinés pour en faire autre chose. Nous n'en sommes qu'à l'étape de l'instruction, de la mise en état. Tout est contestable, l'ADN, l'aveu, les produits interdits : chacun le sait et en use dans sa propre démarche.
Il n'y a jamais aucune évidence, car si c'était le cas, les services de police seuls suffiraient à résoudre les questions, l'instruction suffirait en soi à dénouer le litige, bref, le contentieux n'aurait aucune raison d'être devant un magistrat, un juge. Or, tout cela existe bel et bien et présente une utilité : rétablir un équilibre, ou peut-être établir un nouveau déséquilibre dans un autre sens.
Notre juge et notre avocat vont contribuer à l'oeuvre : en général, le second va procéder par affirmations péremptoires, et le premier va tâcher de faire mine de l'entendre, car tant que la décision écrite n'est pas écrite, on peut soutenir ce que l'on veut. Il faut faire bonne figure, surtout lorsque le justiciable est là. Après la décision après un délibéré, les justiciables vont se dire l'un et l'autre : la justice n'a pas été rendue.
Personne n'est satisfait, car lire la décision après avoir vécu la mise en état nécessite un certain recul, une certaine désinvolture, mais cette fois-ci pour le justiciable. Il va se retrouver dans des passages écrits pour ce qu'il connaît lui de son affaire. Mais il va vite trouver la discussion du magistrat ou du juge, et quelle discussion : le magistrat, à son tour, a procédé à sa relecture des faits et à son interprétation des textes légaux. Le justiciable tombe des nues : il ne se retrouve pas dans la décision, car en plus que les faits soient "adaptés" au dispositif, des faits importants disparaissent, des faits nouveaux apparaissent, des interprétations subjectives sont développées, et quelquefois, le justiciable fait l'objet de propos méprisants et dénigrants du magistrat.
Il se dit, son avocat bien intentionné (pour lui ponctionner de nouveaux honoraires) lui dit : "il faut faire appel et on va rétablir tout cela".
Mais le tout cela s'est déjà réduit à peu de cela, et effectivement, on parle au justiciable d'une fiction : l'effet dévolutif de l'appel.
Malheureux !
Pour le moment, il a sous les yeux une décision incompréhensible où des propos pas toujours très lisibles lui sont tenus, où des faits ont été "revisités", ou du droit a été plus ou moins appliqué. L'avocat, même novice, n'est pas perdu, car c'est ce que l'on commence à lui faire découvrir au CRFPA, tout en tentant de préserver la pureté de ses études : cela ne va pas faire long feu dans la réalité, et les "jeux de rôles" des binômes vont rapidement exploser face à de véritables enjeux humains pour lesquels les barreaux organisent des stades de "détachement", stage à caractère essentiellement psychologique pour apprendre à comprendre que c'est comme cela et qu'un avocat doit s'y faire, tout comme le juge s'y est fait lorsqu'il était auditeur de justice.
Dans cette "cuisine", le justiciable se dit qu'il va bien passer du côte de la table et qu'on va enfin lui servir du droit en appel, et bien plus simplement de la justice, notammen en rétablissant l'exactitude des faits (c'est au moins ce que lui explique son avocat, cher avocat). Pauvre justiciable qui n'a pas encore compris que pour l'établissement des faits, c'est cuit.
Qui est le jouet de qui ?
Allez savoir car l'avocat y perd également en crédibilité, ce qui a un moment ou un autre fini par se savoir, et l'avocat qui prétend maintenir sa marge bénéficiaire coûte que coûte devient de plus en plus cher sans être "meilleur".
Cela ira mieux en appel, pense-t-on. Les magistrats sont plus proches de la cour de cassation où ils envisagent de finir leur carrière, donc ils vont bien mieux se comporter. On a la faiblesse de le croire. Ce n'est bien qu'une faiblesse et qu'une croyance...
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(à suivre).
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