La décision différée du Conseil Supérieur de la Magistrature était bien attendue ce vendredi 24 avril 2009 à 14 heures concernant le juge Fabrice Burgaud, aujourd'hui âgé de 37 ans.
Elle été rendue à l'heure dite.
Tout le microcosme judiciaire en parle, mais ce microcosme n'est peut-être pas le seul intéressé. Ce sont des "gens" qu'il faut parler, des gens qui ont supporté l'insupportable sous l'empire de ce juge qui n'était pas seul à la manoeuvre.
Il faut particulièrement penser à celui qui n'a pas pu supporter, qui est mort sans connaître son innocence... (ils étaient 13 directement concernés avec celui-là, et bien plus encore si l'on compte leur famille).
Il faut particulièrement penser aux parents des mis en accusation qui n'ont pas attendu la fin de l'histoire pour casser leur pipe...
Il faut penser à ces gens, pressentis pour être nommés "innocent" mais qui en réalité ne le sont plus car un "système" a amené l'opprobre sur leur vie : 64 magistrats tout de même, ont participé d'une façon ou d'une autre sur ce pan d'Outreau (car n'oublions pas qu'Outreau ne se limite pas à cette affaire médiatisée à l'excès).
Personne ne pensait plus pareil après le traumatisme judiciaire de cette affaire d'Outreau, l'un des seuls mis en lumière, ... et les autres, ceux dont on ne parle pas, qu'en est-il ?.
Ne parlons pas de ce juge car il y a bien longtemps que l'intérêt qu'il suscite n'est en réalité que du mépris ou de l'indifférence, l'indifférence pouvant suffire, car il ne faut pas concentrer la mal uniquement sur l'une de ses branches.
Il y a des branches a élaguer, c'est certain. Comment dans le contexte actuel ou même le nouveau recrutement des magistrats est remis en cause ?
Attendre l'évaporation naturelle ?
Illusion, notamment si la Cour de cassation persiste à développer "sa doctrine" qu'elle n'hésite pas aujourd'hui à citer comme telle dans ses arrêts.
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Intéressons-nous bien plus utilement à la formation du CSM qui a rendu cette décision, la formation qui résulte de la Constitution dans sa rédaction antérieure à la Loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 puisque le loi organique devant mettre en oeuvre les nouvelles dispositions constitutionnelles n'est toujours pas adoptée.
Ne nous trompons pas de formation.
Bien que le juge incriminé ait aujourd'hui intégré le ministère public, il relevait de la formation des magistrats du siège en tant que juge d'instruction, devant la formation disciplinaire du CSM. Une "réprimande" avec inscription au dossier, autant dire pour un enfant que l'on gronde, ce qui n'a guère d'incidence ni d'effet.
Au fait, quelles étaient les neufs sanctions possibles ?
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Et puis cette décision ira en appel où l'atavisme entre magistrats risque de faire de rien, d'une décision très favorable, moins que rien, nourrissant plus encore la défiance des justiciables.
Avec au surplus une affaire dans l'affaire puisqu'un magistrat qui siégeait dans cette formation du CSM (présidé pour l'occasion par Monsieur Vincent Lamanda, Premier président de la Cour de cassation, ignorant de ce fait), a également participé à l'affaire d'Outreau : conflit d'intérêt, absence d'équité, d'où la nullité encourue très fortement pour cette décision.
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Comment imaginer que le magistrat concerné mente dans le cadre de sa fonction disciplinaire au Président de l'occasion du CSM ?
Comment ne pas imaginer que le mensonge aurait été voulu pour qu'en tout état de cause, si la décision n'était pas si favorable que cela, elle fasse l'objet d'un appel favorable devant le Conseil d'État ?
- Nous ne le saurons que dans quelques semaines, voire quelques mois. Nous devrons patienter...
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Une décision favorable bien peu équitable et qui va faire couler encore beaucoup d'encres, et pas toujours très claires, car n'oublions pas la presse, à l'époque de l'instruction, qui s'acharnait contre les mis en examens.
Alors, il faudra être circonspect à lire ce que pourra nous en dire le prétendu "chien de garde" de la démocratie.
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Dans cette affaire à multiples facettes, de qui se moque-t-on ? Qui est dupe ?
Pourquoi ignorons-nous toujours à ce jour, nous le public, le montant des indemnisations secrètes versées par l'État aux innocents, alors que le matin même de la décision du C.S.M., sa teneur fuitait déjà dans les médias ? D'ailleurs, pourquoi le secret a-t-il été demandé aux innocents alors qu'ils n'ont plus rien à cacher ? Peut-on avoir confiance dans les journalistes qui nous incitent à ne pas avoir confiance dans la justice, alors qu'eux-mêmes dissimulent des informations qui sont "d'intérêt public" ?
Il va encore y avoir nécessairement des remous, surtout avec le départ imminent de l'actuel Garde des Sceaux, appelé sur d'autres dossiers pour lesquels personne ne nourrit la moindre inquiétude sur son investissement dans la connaissance des dits dossiers en contrepartie duquel les députés européens sont rémunérés.
D'où l'intérêt de la note de synthèse...
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(NDLR : Merci au commentaire déposé le samedi 25 avril à 23 heures 05 et qui procède à la rectification d'un propos qui malheureusement ne présente plus d'intérêt pour le public, mais uniquement un vif intérêt pour sa famille. La thèse "officielle" reste celle du suicide, à défaut d'en disposer d'une autre, et même si une instruction est ouverte sur ce décès suspect dans les locaux de l'administration pénitentiaire, il n'en demeure pas moins que dans cette zone de non droit dont beaucoup de détenus se plaignent, et pour la plupart après, lorsqu'ils en sont sortis, il y a peu de chance que l'instruction aboutisse concrètement à autre chose d'autre que ce qui a été soutenu par cette administration dès l'origine. Ce serait là aussi remettre en cause l'incarcération en France et la réalité de la "réinsertion" à laquelle elle est censée répondre.
Des mots tout cela et rien ce concret.
Il est mort, François Mourmand, avant la tenue du procès, et sans plus de connaissances à ce sujet, l'action publique a été éteinte en ce qui le concerne, mais il n'a du coup pas été innocenté. Il n'y a rien à redire sur le plan du droit, mais beaucoup sur la question de l'humanité, d'où l'actuel combat de sa famille qui voudrait savoir, trouver la paix...
Les conditions d'incarcération sont organisées de telle façon que le suicide est envisageable, et que par conséquent, le doute va aller au bénéfice du plus fort.
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La délivrance de médicaments de tous ordres se fait dans deux cas :
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1)- soit le détenu est dans une unité médicalisée judiciaire (pardonner l'inexactitude de l'appellation), et la délivrance des médicaments est faite par une IDE (infirmière diplômée d'État) trois fois par jour, IDE qui veille à ce que le détenu ingère face à elle les médicaments, car en présence d'un surveillant de prison (et en général plutôt deux), elle tend au détenu les médicament dans une main et un verre d'eau dans l'autre. Certains détenus font pourtant semblant d'ingérer ces médicaments. Aussi, pour s'en assurer, l'infirmière lui demande ensuite systématiquement d'ouvrir la bouche et de soulever la langue au cas où... Les deux surveillants sont là et surveillent toute la manoeuvre. Le détenu ne peut échapper à la prise des "cachetons".
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2)- soit le détenu est dans une unité de détention classique (quel que soit le type d'encellulement) : les médicaments sont délivrés en une fois, par le passage dans la matinée d'un surveillant (portant une blouse blanche, ce qui est rassurant), qui remet une pochette contenant la prescription du jour. Le passage est donc réalisé 7 jours sur 7 et en une fois. La pochette contient les médicaments emballés ainsi qu'une liste imprimée pour mémoire mentionnant la délivrance. Le détenu est seul face à ses médicaments, qui couvrent tous ses besoins médicamenteux de la journée (une prise, deux prises, trois prises). Personne ne contraint le détenu à les avaler. Il peut donc jeter un certain nombre d'entre eux ou les avaler conformément à la posologie prescrite. Il peut enfin, les stocker, car la "fouille" des cellules n'est pas quotidienne, et des pilules, une fois déballées, se dissimulent assez facilement dans une cellule malgré l'état de dépouillement dans lequel elle peut être. Par un "yoyo", le détenu peut également les faire stocker par un détenu logé dans une cellule voisine...
Donc, il existe un certain nombre de possibilités de ne pas avaler les médicaments et de les stocker.
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Ces explications doivent permettre de comprendre comment le doute peut naître et comment le 13ème d'Outreau a eu ou non la possibilité de se suicider par "overdose" médicamenteuse.
Ce doute, malgré une enquête interne diligentée après la mort de chaque détenu incarcéré, exonérera, comme à chaque fois, l'administration pénitentiaire, et donc exonérera l'État de toute responsabilité.
Il y a plus de 100 "suicides" chaque année dans les prisons françaises (un tous les 3 jours), et depuis le début de l'année 2009, ce nombre inquiétant "explose". Les médias, de ce point de vue, en parlent, mais comme dans beaucoup d'articles, on expose ligne après ligne les faits constatés (la mort d'un détenu), mais le "chien de garde" de la démocratie ne va jamais plus loin, et souvent plusieurs jours après le décès, car la "fuite" provient la plupart du temps, non pas d'un communiqué officiel de l'administration pénitentiaire, mais de la famille d'un autre détenu à l'occasion d'un parloir.
Lorsqu'un suicide est constaté, tous les détenus sont ramenés en cellule, où qu'ils soient, où restent stockés à l'extérieur, tant que les opérations d'enlèvement de la dépouille mortelle n'a pas été faite. Les mouvements des détenus sont stoppés pendant tout ce temps. Donc, a priori, seuls les surveillants (les "matons") sont informés. Mais cela "fuite" aussi chez les surveillants, particulièrement pour ceux qui se sont laissés convaincre par une rémunération élevée pour aucune qualification, mais qui sont révulsés de passer un tiers de leur vie active en prison dans les conditions d'incarcération que les médias décrivent aujourd'hui, sans réellement nous faire sentir la réalité de l'enfermement.
L'administration pénitentiaire sait que la sanction est en train de venir et qu'elle va probablement faire très mal, un détenu étant (en prison) un incapable, sous la garde de l'État. Nous connaissons la désinvolture du législateur et du Garde des Sceaux, les deux entre un discours officiel qui irait dans le bon sens et une réalité qui va diamétralement à l'opposé.
C'est encore un avatar à suivre.
Que de problèmes dans cette justice, là ? Ne méritons-nous pas une autre justice ?
Non, crise oblige, maintient des marges bénéficiaires, maintient des salaires exorbitants des "gros" patrons, maintient du bouclier fiscal, hausse du chômage vertigineuse, émission à tour de bras d'emprunts obligataires pour préserver un système de privilèges, il n'y a guère de budget pour l'amélioration des conditions de détention alors que la politique est de plus en plus répressive.
Que faire ? Ne rien faire alors que tout le monde est concerné potentiellement par de telles accusations, par une incarcération préventive injustifiée ?
Si vous avez des suggestions, faites-en part par un commentaire même anonyme.
On a bien peur que cela n'aille pas très loin.
C'est effrayant.).
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CITATIONS :
http://jprosen.blog.lemonde.fr/ - blog de Jean-Pierre Rosenczveiq
« des négligences, maladresses ou défaut de maitrise » dont « l’accumulation constitue un manque de rigueur caractérisé de nature à nuire au bon déroulement de l’information, et en conséquence, un manquement par M. Burgaud aux devoirs de son état de juge d’instruction»
"fiction de l’interdiction de critiquer un jugement"
"S’ils commettent des fautes personnelles, ils doivent être pénalement et disciplinairement punis ; s’ils causent un préjudice, l’Etat devra indemniser et pourra se retourner contre eux par une action récursoire."
“Attendu que les négligences, maladresses ou défauts de maîtrise retenus à l’encontre de M. Burgaud ne révèlent ni une activité insuffisante, ni un non respect de la loi ou de la jurisprudence en matière de procédure pénale, ni une absence d’impartialité ou de loyauté de nature à porter une atteinte aux droits de la défense qui n’ont, d’ailleurs, été relevés par aucune des parties ou par la chambre de l’instruction ; Attendu que, toutefois, si chacun de ces défauts de maîtrise, ces négligences ou ces maladresses, ne constitue pas, pris séparément, un manquement susceptible de recevoir une qualification disciplinaire, leur accumulation constitue, en l’espèce, un manque de rigueur caractérisé, de nature à nuire au bon déroulement de l’information et, en conséquence, un manquement, par M. Burgaud, aux devoirs de son état de juge d’instruction ; (…)”
"Ce faisant le CSM prend le risque de n’être pas compris. Le prochain CSM verra les magistrats perdre leur majorité, on ne pourra plus l’accuser de corporatisme, mais de jugement politique. "
1 commentaire:
Il n'a pas été établi que François Mourmand s'est suicidé. Cette thèse est d'ailleurs largement contestée... Il est mort d'une surdose médicamenteuse, mais les circonstances exactes sont inconnues.
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